PLEASE, LOOK UP

PLEASE, LOOK UP

Ca fait des jours et des jours que je vois la toile se déchainer sur le sujet « Don’t Look Up » ce film d’Adam McKay avec un casting incroyable, y figurent: Jennifer Lawrence, Leonardo DiCaprio, Meryl Streep, Timothée Chalamet et plein d’autres acteurs et actrices talentueux.se.s.

Je n’avais pas le temps de le regarder dans l’immédiat (semaine de reprise au boulot, you know) mais je n’ai pas pu résister à la tentation de lire quelques critiques, qui sont pour la plupart, négatives. Bon… Le pitch m’avait pourtant convaincue: une satire qui dénonce l’absurdité de notre société, pourquoi les gens sont-ils aussi mécontents?

Et puis là, miracle. Mon samedi soir se libère: je vais enfin me faire mon propre avis sur ce film (ce qui manque d’ailleurs cruellement à ceux pour qui l’opinion d’affiliation est un sport).

Spoiler alert: je vais faire des références précises au film.

Dès les premières minutes je suis conquise, on démarre déjà bien avec une nana scientifique en rôle principal (c’est pas comme s’il en pleuvait). Le parallèle crise climatique et comète est très clair dès le début, ce qui me rend extrêmement nerveuse mais également super attentive.

Pour ceux qui ne l’ont pas vu mais souhaitent tout de même lire cet article, le sujet principal du film est la découverte d’une comète qui fonce tout droit sur la Terre menaçant de détruire toute vie sur celle-ci. Les scientifiques alertent alors les autorités compétentes qui ne prennent absolument pas la chose au sérieux.

Le film a commencé depuis 10 minutes qu’on se retrouve déjà dans le bureau oval (bureau de la Présidente des Etats Unis, on évitera de dire Amérique car ils ne sont pas le seul pays d’Amérique, merci) où Kate Dibiasky et Randall Mindy (Jennifer Lawrence et Leonardo DiCaprio) expliquent tant bien que mal à la Présidente (Meryl Streep, qu’on se le dise: elle joue Trump) qu’il est question notamment de l’extinction de la race humaine (cf la crise climatique) et qu’il leur reste 6 mois pour empêcher cette catastrophe (la crise climatique tuent déjà des millions de personnes, je pose ça là). La Présidente, évidemment, n’en a que faire puisqu’elle est plus préoccupée par les élections qui arrivent que par la catastrophe imminente. De plus, elle est condescendante, arrogante, sexiste et agiste (elle et son assistant coupent sans arrêt la parole à Jennifer Lawrence (qui est taxée d’hystérique, étonnant tiens) alors qu’ils écoutent (un peu) mieux les propos de DiCaprio). A noter que son assistant est en réalité son fils, probablement parvenu à ce poste sans mérite ni justification valable, qui peut encore dire qu’il n’y voit pas l’absurdité du système politique actuel et son légendaire copinage?

Cette scène est lunaire et en même temps si réelle, on a affaire à un mépris du corps scientifique par le corps politique, business as usual. C’est flagrant comme le nez au milieu du visage, c’est une réplique à l’identique de la scène du documentaire Animal (de Cyril Dion) où deux activistes sont méprisés au Parlement Européen pour avoir tenté d’alerter sur la crise climatique.

Cette scène met en colère, c’est la même colère que lorsque la Belgique refuse de prendre ses responsabilités face à la crise climatique et sociale. C’est littéralement le même ressenti, la même injustice, la même impuissance; et si vous ne le voyez pas de la sorte: soit vous vivez dans une grotte (restez-y) soit vous êtes tellement assis sur vos privilèges que vous avez le cul endormi.

Tous les détails de ce film sont parfaits, tous les maux de la société y sont traités (ou presque). On y voit des images de la faune et la flore flamboyantes suivies d’images de déchets ménagers. Kate Dibiasky est méprisée pour son look androgyne et taxée de lesbienne dès les premières scènes (bah oui, c’est quand même nos vêtements qui indiquent notre orientation sexuelle quoi). Tous les scientifiques sont silenciés et poursuivis en justice s’ils ne respectent pas cette censure. (On dirait instagram qui supprime des posts d’activistes, oh wait: c’est la même chose).

La couverture médiatique de l’évènement est inexistante, la presse s’intéresse d’avantage à la rupture de deux pop stars (bah oui ça fait moins de cliques). Toutes les interventions scientifiques doivent être romancées, simplifiées, telle une scène d’Idiocracy. Les citoyens sont infantilisés, endoctrinés par le corps politique leur demandant de ne pas « Look Up » afin qu’ils ne voient pas la comète qui leur fonce dessus.

Il suffit de scroller Instagram, d’allumer la télévision ou la radio pour constater amèrement que ce film c’est un miroir de notre société.

Le racisme y est évoqué à plusieurs reprises, notamment lors de l’arrestation d’un scientifique noir (qui, en prime, craint les violences policières) mais également par le mépris constant de l’Orient: l’Inde, la Chine et le continent africain entier sont constamment moqués, notamment par le héros désigné par le gouvernement, un états-unien blanc raciste, sexiste, homophobe (les remarques homophobes de ce dernier ne manquent pas non plus), bref le type coche toutes les cases. Il termine d’ailleurs par tirer à l’arme à feu sur la comète approchante (qui n’en a que faire, c’est une comète bon sang), symbole de son idiotie.

En bref, « Don’t Look Up » c’est, selon moi, un chef d’oeuvre. Ce film dénonce l’absurdité de notre société, le mépris scientifique, l’arrogance et le déni politique, les hauls TikTok qui font plus de vues que les documentaires éducatifs, l’homophobie, le racisme, la misogynie, le classisme (gros mépris de classe notamment de la présentatrice télé envers l’épouse du scientifique Mindy), le climatosceptisme, et surement d’autres choses que j’ai oubliées. Ce film dénonce l’idée que « la technologie nous sauvera tous » (lol) alors que cette idéologie ne sert qu’à enrichir… ceux qui sont déjà beaucoup trop riches.

Ce film dénonce notre manque cruel d’empathie et notre nombrilisme incessant.

Bref, il est temps de Look Up.